LE LAIT | MILK |
Émile Verhaeren | trans. John Gallas & Kurt Ganzl |
Dans la cave très basse et très étroite, auprès Du soupirail prenant le frais au Nord, les jarres Laissaient se refroidir le lait en blanches mares, Dans les ronges roudeurs de leur ventre de grès. On eût dit, à les voir crêmer dans un coin sombre, D'éormes nénuphars s'ouvrant par les flots lents, Ou des mets protégés par des couvercles blancs Qu'on réservait pour un repas d'anges, dans l'ombre. Plus loin, les gros tonneaux étaient couchés par rangs, Et les jambons suant leurs graisses et leurs sangs, Et les boudins crevant leur peau, couleur de cierge, Et les flancs bruns, avec du sucre autour des bords, Engageaient aux fureurs de ventres et de corps ... - Mais en face le lait restait froid, restait vierge. | In a low, narrow cellar, near a window of north-sent light, the cruses cooled the white-pooled milk in their fat, red, earthen roundness. Perhaps say, sleeping in their dark corner, they looked like waterlilies, huge-opening in waves of slowness, their helpings kept beneath white lids, held fair for angel-eating only in the dark. Two sat lines of fat pots. queried And great plates of hams and gammons, skin-popping, wax-shade meatpuddings and buffy tarts all sugar-strung, great galumphs of guts and flesh - but there, across, the milk stayed immaculate and cold. |
Published in "PN Review" no. 186 Mar/Apr.2009