À LA MUSIQUE TO MUSIC
Arthur Rimbaudtrans. James Kirkup (tanka)
Place de la Gare, à Charleville



Sur la place taillée en mesquines pelouses,
Square où tout est correct, les arbres et les fleurs,
Tous les bourgeois poussifs qu'étranglent les chaleurs
Portent, les jeudis soirs, leurs bêtises jalouses.



- L'orchestre militaire, au milieu du jardin,
Balance ses schakos dans la Valse des fifres:
- Autour, aux premiers rangs, parade le gandin;
Le notaire pend à ses breloques à chiffres.



Des rentiers à lorgnons soulignent tous les couacs:
Les gros bureaux bouffis traînent leurs grosses dames
Auprès desquelles vont, officieux cornacs,
Celles dont les volants ont des airs de réclames;



Sur les bancs verts, des clubs d'épiciers retraités
Qui tisonnent le sable avec leur canne à pomme,
Fort sérieusement discutent les traités,
Puis prisent en argent, et reprennent: "En somme! ...



Épatant sur son banc les rondeurs de ses reins,
Un bourgeois à boutons clairs, bedaine flamande,
Savoure son onnaing d'où le tabac par brins
Déborde - vous savez, c'est de la contrebande; -



Le long des gazons verts ricanent les voyous;
Et, rendus amoureux par le chant des trombones,
Très naïfs, et fumant des roses, les pioupious
Caressent les bébés pour enjôler les bonnes ...



- Moi, je suis, débraillé comme un étudiant,
Sous les marronniers verts les alertes fillettes:
Elles le savent bien; et tournent en riant,
Vers moi, leurs yeux tout pleins de choses indiscrètes.



Je ne dis pas un mot: je regarde toujours
La chair de leurs cous blancs brodés de mèches folles:
Je suis, sous le corsage et les frêles atours,
Le dos divin après la courbe des épaules.



J'ai bientôt déniché la bottine, le bas ...
- Je reconstruis les corps, brûlé de belles fièvres.
Elles me trouvent drôle et se parlent tout bas
- Et mes désirs brutaux s'accrochent à leurs lèvres ...
Place de la Gare, Charleville

On the square, chopped up
into scruffy plats of grass,
square where all is prim
and proper, trees and flowers,
all the big nobs, panting

in the heat, parade
each Thursday evening, their
stupid jealousies.
- The brass band, parked dead centre,
wags its plumes to a strident waltz.

All round, in front rows,
the dandy flaunts; the lawyer
dangles his watch-fobs:
fat cats with quizzing-glasses
beat time to all the wrong notes.

Blown-up businessmen
drag their voluminous dames
behind whom there trail
punctilious chaperons,
flounces flapping like handbills.

On the green benches,
the clubs of retired grocers
poke at the gravel
with silver-topped walkîng sticks,
gravely debate exchange rates

agree "All in all..."
- Flattening his bloated bum
upon his bench, one
brass-buttoned bourgeois balloons
his Flemish corporation,

savours his meerschaum
scattering tobacco shreds -
it's contraband stuff,
you know - while hooligan gangs
snigger on the well-kept lawns.

Feeling romantic
with the moans of the trombones,
naively smoking
rose petals, swaddies caress
babies, try to make the maids...

As for me, unkempt
freshman student, I follow
some flighty young girls,
along the green chestnut walks.
They know - turn on me, laughing,

their eyes all full of
improper thoughts... I'm struck dumb,
keep on gazing at
the flesh of their pallid napes
aflutter with windblown locks ...

I explore, beneath
their bodices' budding charms
divine spines falling
from their shoulders' gentle curves,
glimpse a buttoned shoe, and then

a hint of stocking...
I re-model whole bodies
fevered with rich heats -
they whisper, find me funny -
my brute lusts ravage their lips...

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Trans. copyright © James Kirkup 2001



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