DOUVE PARLE | DOUVE SPEAKS |
Yves Bonnefoy | trans. Galway Kinnell |
I Quelquefois, disais-tu, errante à l'aube Sur des chemins noircis, Je partageais l'hypnose de la pierre, J'étais aveugle comme elle. Or est venu ce vent par quoi mes comédies Se sont élucidées en l'acte de mourir. Je désirais l'été, Un furieux été pour assécher mes larmes, Or est venu ce froid qui grandit dans mes membres Et je fus éveillée et je souffris. II Ô fatale saison, Ô terre la plus nue comme une lame! Je désirais l'été, Qui a rompu ce fer dans le vieux sang? Vraiment je fus heureuse À ce point de mourir. Les yeux perdus, mes mains s'ouvrant à la souillure D'une éternelle pluie. Je criais, j'affrontais de ma face le vent... Pourquoi haïr, pourquoi pleurer, j'étais vivante, L'été profond, le jour me rassuraient. III Que le verbe s'éteigne Sur cette face de l'être où nous somnes exposés, Sur cette aridité que traverse Le seul vent de finitude. Que celui qui brûlait debout Comme une vigne, Que l'extrême chanteur roule de la crête Illuminant L'immense matière indicible. Que le verbe s'éteigne Dans cette pièce basse où tu me rejoins, Que l'âtre du cri se resserre Sur nos mots rougeoyants. Que le froid par ma mort se lève et prenne un sens. |
I Sometimes, you used to say, wandering at dawn On blackened paths, I shared the stone's hypnosis, I was blind like it. Now that wind has come by which all my games Are given away in the act of dying. I longed for summer, A furious summer to dry my tears, Now has come this coldness which swells in my flesh And I was awakened and I suffered. II O fatal season, O barest earth like a blade! I longed for summer, Who has broken off this sword in the old blood? Truly I was happy At this moment of dying. Eyes lost, hands opening to the sullying Of an eternal rain. I cried out, I confronted the wind, Why hate, why weep, I was alive, The deep summer, the day reassured me. III Let the word burn out On this slope of being where we are stranded, On this arid land Which only the wind of our limits crosses. Let him who burned standing up Like a vine, Let the wildest singer roll from the crest Illuminating Vast unutterable matter. Let the word burn out In this low room where you come to me, Let the hearth of the cry close down On our ember-words. Let the cold by my death arise and take on meaning. |
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