LES BIJOUX | THE JEWELS |
Charles Baudelaire | trans. David Constantine |
La très chère était nue, et, connaissant mon coeur, Elle n'avait gardée que ses bijoux sonores, Dont le riche attirail lui donnait l'air vainqueur Qu'ont dans leurs jours heureux les esclaves des Mores. Quand il jette en dansant son bruit vif et moqueur, Ce monde rayonnant de métal et de pierre Me ravit en extase, et j'aime à la fureur Les choses où le son se mêle à la lumière. Elle était donc couchée et se laissait aimer, Et du haut du divan elle souriait d'aise À mon amour profond et doux comme la mer, Qui vers elle montait comme vers sa falaise. Les yeux fixés sur moi, comme un tigre dompté D'un air vague et rêveur elle essayait des poses, Et la candeur unie à la lubricité Donnait un charme neuf à ses métamorphoses; Et son bras et sa jambe, et sa cuisse et ses reins, Polis comme de l'huile, onduleux comme un cygne, Passaient devant mes yeux clairvoyants et sereins; Et son ventre et ses seins, ces grappes de ma vigne, S'avançaient. plus câlins que les Anges du mal, Pour troubler le repos où mon âme était mise, Et pour la déranger du rocher de cristal Où, calme et solitaire, elle s'était assise. Je croyais voir unis par un nouveau dessin Les hanches de l'Antiope au buste d'un imberbe, Tant sa taille faisait ressortir son bassin. Sur ce teint fauve et brun le fard était superbe! - Et la lampe s'étant résignée à mourir, Comme le foyer seul illuminait la chambre, Chaque fois qu'il poussait un flamboyant soupir, Il inondait de sang cette peau couleur d'ambre! |
She I love much was nude except that she, Knowing my likings, had kept her jewellery on, Which sonorous gear gave her the mastery Slaves have on good days over their sultan. When it flings out its quick and mocking noise This dancing world brilliant with metal and stone Ecstasies me, I love to madness those Things in which light and sound combine and join. So she lay out on high allowing me To love her couched up there smiling at ease Down at my love as deep and gentle as the sea That towards her, up the cliff-face of her, rose. Eyes fixed on me, beast in captivity, In a dreaming absent-mindedness she tried out poses Whose candour mixing with lubricity Gave a new edge to her metamorphoses; And her arms, her legs, her bum, her thighs, Smooth as oil, swanlike, serpentine, Displayed to my serene clear-seeing eyes, And her belly and breasts, grape-clusters of my vine, Came on more sweetly than the Bad Angel And troubled the repose my soul had made And moved her from her crystal pedestal Where she had sat, calmly in solitude. In a new design, her buttocks salient, I seemed to see Antiope's thighs below The bust of a smooth boy, magnificent Her fauve and painted duskiness on show And the lamp having resigned itself to die Firelight was all the lighting that room had And sudden flames, exhaling with a sigh, Coloured her amber skin blood-red. |
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Trans. Copyright © David Constantine 2006; publ. in Modern Poetry in Translation III.5